Les arguments d’une réforme néo-libérale

Les arguments d’une réforme néo-libérale

Pour justifier sa loi sur les retraites, le gouvernement invoque tout d’abord la nécessité de préserver l’équilibre financier. En effet, s’appuyant sur le rapport du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), la 1ère ministre veut éviter un futur déficit qui oscillerait entre 12 et 17 milliards d’euros annuels. Pour y répondre, le choix est fait de reporter l’âge légal de départ à 64 ans et de passer dès 2028 aux 43 annuités de cotisation prévues par la loi Touraine de 2014. Autre argument martelé par l’exécutif, nous vivons plus longtemps, il faut donc travailler plus longtemps pour garan- tir la pérennité du système par répartition puisqu’en 2030 il n’y aurait que 18 millions d’actifs pour 20 millions de retraités. Le troisième argu- ment avancé est celui de la justice et de la valeur travail. La réforme proposée permettrait d’améliorer le statut des femmes par la comptabilisation de quatre trimestres de congés parental et par le maintien de l’âge de 67 ans comme date butoir déclenchant une retraite à taux plein pour celles qui n’ont pas toutes leurs cotisations. Par ailleurs, une retraite à 1200 € minimum serait garantie pour une carrière complète au niveau du smic.

Le gouvernement a eu beaucoup de mal à faire la pédagogie de sa réforme, ainsi le ministre Franck Riester a admis que les femmes étaient pénalisées. Quant à l’économiste Michaël Zemmour, il a prouvé que les 1200 € promis étaient un effet d’annonce qui ne concernerait qu’une poignée de retraités. Interrogé, le ministre du Travail Olivier Dussopt a annoncé le chiffre de 40000 bénéficiaires de ces 1200 € sans jamais le démontrer. Nécessaire, indispensable à la survie du système selon les communicants du gouvernement, ses opposants y voient plutôt une machine de guerre néo-libérale. Les propos de Bruno Le Maire fin septembre 2022 sur France Inter donnent une partie de la réponse : « Il faut bien financer nos hôpitaux, nos collèges, nos lycées, nos universités, et c’est la réforme des retraites qui permettra de garantir ce financement ». Le conseiller politique Alain Minc allait dans le même sens en confiant que le président de la République voulait rassurer les marchés financiers, ce que ce dernier a fini par reconnaître.

Les exonérations massives de cotisations et d’impôts dont bénéficient les entreprises au nom de la compétitivité qui, selon la commission des comptes de la Sécurité Sociale, s’élèveront à 84,6 milliards d’euros en 2023, sont également dénoncées. En effet, cette politique est très discutable car elle n’a pas créé plus d’emplois mais ces importantes exonérations servent souvent les grandes entreprises à rémunérer grassement actionnaires et dirigeants. Enfin, la précarisation des seniors qui peinent à rester en emploi en fin de carrière aura des conséquences terribles sur leur retraite. Il convient aussi d’ajouter que ce report de l’âge légal va tendre un marché de l’emploi déjà fragile et ce, d’au- tant plus que les conditions pour bénéficier de l’assurance chômage ont été durcies. Quant aux jeunes, ils vont encore voir leur entrée dans le monde du travail retardée ou complexifiée alors qu’en moyenne leur situation se stabilise aujourd’hui à 27 ans selon le CESE.

Au final, cette réforme n’est qu’un pas de plus vers une privatisation de notre système de retraite. Nous passerions alors d’un système par répartition intégrale à un système avec un minimum assuré par répartition et une part complémentaire en capitalisation qui dépendra de la possibilité financière de chacun. Une sorte de retraite de classe.

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