Et la culture ?

Et la culture ?

Quand on parle de culture, parle-t-on de la culture de l’ensemble d’une population ou d’une culture de classe ? Dans le Biterrois, si on fait un tour d’horizon rapide, il suffit de regarder ce que proposent les deux mastodontes que sont Zinga-Zanga ou Bayssan pour se rendre compte que nous avons d’un côté des spectacles très-très-très grand public, et, de l’autre, une programmation visant une clientèle d’un niveau largement au-dessus de la moyenne. Une sorte de grand écart culturel. Le tout à destination des plus de 40 ans.

Et au milieu coule une rivière… de sable. Le désert de Gobi. Une fois de plus, les 18-25 ans sont les grands absents d’un système pensé par des organisateurs qui sont à des années-lumière des attentes d’une jeunesse « oubliée » voire ostracisée parce qu’elle a toujours un coup d’avance et qu’elle veut se démarquer de la génération qui la précède en revendiquant une identité qui lui est propre. Ce n’est pas nouveau. Les années 50 ont vu apparaître le rock’n’roll, la décennie suivante les yéyés, puis surgirent la pop music, le hard rock, le punk, la new wave, le rap, la techno… avec toujours le même rejet, la même incompréhension d’une génération passée devenue passéiste, larguée par la nouvelle.

Contrairement à une idée reçue, si les jeunes pratiquent les loisirs de manière massive, intense et diversifiée, ils ont aussi soif de culture, de plusieurs cultures ; une culture générationnelle, hier basée sur la musique et le cinéma et aujourd’hui sur le tout numérique, à laquelle s’ajoutent de manière moins prononcée des activités plus classiques comme le théâtre, la littérature, la science…

Il faut donc permettre aux jeunes d’accéder à toutes les formes de culture en apportant les moyens pédagogiques appropriés et en proposant des scènes adaptées à leur capital culturel.

Bien sûr, on peut trouver quelques lieux underground à Béziers pour des concerts de musique alternative, découvrir les programmations éclectiques du théâtre de l’Ardaillon à Vias ou de la Cigalière à Sérignan, se rendre au Diversival de Vendres, tomber de-ci de-là sur quelques œuvres de street art parfois réalisées sous l’impulsion d’une municipalité, adhérer à des associations de quartier ou à des MJC qui proposent des offres culturelles en direction de la jeunesse, mais tout cela reste très marginal. Rien ou presque de conséquent et surtout de récurrent pour une jeunesse dont la masse finit inexorablement par s’abrutir devant Hanouna et consorts faute de mieux.

Enfin, il y a la fracture sociale et géographique. Aller au cinéma, au théâtre, au musée ou à un concert, acheter un livre quand on est étudiant ou sans emploi et que l’on doit compter le dernier p’tit sou pour boucler le mois font partie de la quadrature du cercle. On le sait, la culture sous toutes ses formes est toujours la première sacrifiée quand des économies sont à faire, ce qui est particulièrement le cas dans le Biterrois où le revenu moyen est parmi les plus faibles de France et où la moitié des moins de 30 ans vit sous le seuil de pauvreté. Ajoutez-y le manque de temps et les difficultés à se déplacer et vous obtenez le cocktail idéal pour maintenir la jeunesse la tête sous l’eau. 

Des Vieilles charrues en Biterrois ?

La saison estivale est celle, en temps normal, des festivals. Des Eurockéennes de Belfort aux  Vieilles charrues, il y en a pour tous les goûts. Plus près de nous, Les Déferlantes d’Argelès (désormais relocalisées à Céret), la scène flottante d’Agde, Les Barques à Narbonne, permettent à de nombreux spectateurs de profiter des plus grands artistes du moment. Il faut avoir vu la masse de jeunes gens qui assistait au concert de Gim’s à Narbonne en 2019 pour comprendre qu’il y a un appétit très important pour ce genre de manifestations dans le bassin du centre Languedoc. Il y a donc un créneau à saisir en faveur de la jeunesse locale, mais aussi dans une perspective d’attractivité culturelle et économique. Un évènement comme Les Déferlantes a attiré 70 000 festivaliers sur quelques jours en 2019. Alors réfléchissons : il faut proposer de l’électro, du rap ou autre chose, mais il faut surtout faire le pari de donner un débouché culturel à une jeunesse qui est souvent la grande oubliée des programmations. Montpellier l’a bien compris dans un autre registre avec le succès retentissant du FISE (Festival International des Sports Extrêmes) qui draine des dizaines de milliers de jeunes sur la ville en un week-end.