Agriculture et viticulture : entre adaptation et prise de conscience

Agriculture et viticulture : entre adaptation et prise de conscience

L’agriculture telle qu’on la connaît depuis la mise en place du modèle productiviste dans les années 1960 est frappée de de plein fouet par le changement climatique. Elle fait partie du problème puisqu’elle en est une des coupables et en devient maintenant la victime en étant à la fois touchée par la sécheresse et par la salinité des sols.
L’irrigation est le premier facteur de consommation d’eau, parfois en dépit du bon sens. Produire du maïs dans les régions méditerranéennes à grand renfort d’arrosage est-il pertinent alors que la ressource se raréfie et que cette céréale est produite dans des espaces moins sous tension en France et en Europe ?

Il est donc impératif de réagir en jouant sur les différents leviers disponibles et en changeant de comportement pour revenir à des cultures plus traditionnelles et adaptées à notre climat. Les viticulteurs sont en pointe sur le sujet avec le remplacement progressif de cépages traditionnels par des cépages résistants importés d’Afrique du Nord par exemple. Beaucoup s’orientent aussi vers l’irrigation du fait du réchauffement, mais celle-ci doit être perfectionnée pour amener la stricte quantité d’eau nécessaire à la plante. La mise en place de systèmes de goutte-à-goutte gérés électroniquement se développe, étant entendu que disperser des tonnes d’eau ne sera bientôt plus admissible. D’autres se dirigent vers la biodynamie avec une réduction des surfaces pour promouvoir une viticulture moins productive mais plus respectueuse des terroirs.
Autre secteur touché, la conchyliculture, victime du réchauffement de la mer et des étangs. Là encore, des solutions techniques sont à l’étude mais cela ne nous dispensera pas d’une réflexion générale quant aux usages de l’eau et à l’impact sur le climat d’une agriculture intensive. Entre agriculture compétitive et massive et production plus réduite, un véritable choix de société se dessine.

Depuis quelques années, à cause du dérèglement climatique et de la surconsommation d’eau, la salinité des sols a fortement augmenté, entraînant la disparition de centaines d’hectares de vignes. Une menace à court terme pour la survie des domaines viticoles du Biterrois, fortement dépendants de l’économie du tourisme, lui-même en partie responsable de la surconsommation d’eau.
À Sérignan, grâce à l’eau pompée pour partie dans l’Orb, le reste étant acheté au réseau du Bas-Rhône, on lave la terre en noyant les vignes régulièrement. Cette pratique ancestrale de submersion utilisée à l’origine pour combattre le phylloxéra a permis par la suite de lutter efficacement contre la salinité, mais elle devient désormais difficile à mettre en œuvre, les eaux de l’Orb et de la nappe phréatique étant de plus en plus salines. Une solution serait la construction d’un barrage pour bloquer les infiltrations de sel, mais la complexité et le coût d’une telle opération la rendent, pour l’instant, impossible.
D’autre part, la salinisation s’enfonçant de plus en plus loin dans les terres, Sauvian, Villeneuve-lès-Béziers et Portiragnes sont égale- ment impactés. De nombreux viticulteurs sont contraints d’arracher et de céder leurs terres devenues incultes et ce, pour une bouchée de pain, car la plupart étant en zone Natura 2000 elles sont de fait inconstructibles. Conséquence indirecte de ces changements de propriétaires, les pouvoirs publics doivent désormais faire face au phénomène grandissant de cabanisation, une pratique illégale qui peut s’avérer dangereuse pour les acquéreurs de parcelles agricoles qui décident de résider dans des habitations de fortune en ces lieux isolés et difficiles d’accès en cas d’inondation ou d’incendie.
Ce phénomène de salinisation des sols n’est pas inhérent au Biterrois puisqu’on le re- trouve également en Petite Camargue où, en 2021, 500 hectares de vignes qui produisent du « vin des Sables » ont été anéantis dans un secteur où la salicorne et les tamaris sont en train de remplacer les roseaux, bouleversant le fragile écosystème existant.

Aqua Domitia

Lancé en 2012, le projet « Aqua Domitia », porté par Région Occitanie et co-financé par BRL, les départements de l’Aude et de l’Hérault, l’Agence de l’Eau Rhône-Méditerranée-Corse, les intercommunalités et le Syndicat du Bas Languedoc, permet, grâce à une conduite de 130 km, d’amener les eaux du Rhône conjuguées aux ressources locales jusqu’au sud du Languedoc.
Ce programme, qui s’inscrit dans la stratégie d’adaptation au changement climatique de la région, apporte des ressources en eau sécurisées et renouvelables pour accompagner le développement économique, maintenir et développer l’agriculture et la viticulture et assurer les besoins en eau potable des territoires à la démographie sans cesse croissante entre Montpellier et Narbonne tout en préservant l’environnement, en particulier les milieux aquatiques les plus fragiles.
Ces nouvelles ressources, d’une capacité volontairement limitée, s’inscrivent dans une logique de réduction des consommations individuelles et d’amélioration de l’efficience des réseaux.

Carte : Aqua Domitia/Région Occitanie/BRL

Laisser un commentaire