Peur sur le livre

Peur sur le livre

Autodafé ou liberté d’expression : quid des médiathèques ?

Lieux de culture, les médiathèques publiques sont aussi un espace de démocratie. Pour de nombreux citoyen-usagers, c’est un endroit dans lequel on peut consulter des ouvrages de référence avec des points de vue extrêmement variés. Comme dans la vie politique, le pluralisme d’une médiathèque est la garantie de la liberté. Les bibliothécaires ont ce principe inscrit dans leur code de déontologie :
« Le bibliothécaire favorise la réflexion de chacun par la constitution de collections répondant à des critères d’objectivité, d’impartialité, de pluralité d’opinion. […] Il s’engage dans ses fonctions à ne pratiquer aucune censure, garantir le pluralisme et l’encyclopédisme intellectuel des collections, offrir aux usagers l’ensemble des documents nécessaires à sa compréhension autonome des débats publics, de l’actualité, des grandes questions historiques et philosophiques ».

D’ailleurs, à Béziers, malgré les alternances radicales qu’a connues la cité et le conflit entre la ville et l’agglomération qui est en charge de la lecture publique, ce principe a toujours été respecté. Les livres du très médiatique premier magistrat tout comme ceux de l’ancien maire figuraient dans les rayons. Avec la nomination d’un nouveau directeur et une orientation culturelle tout à fait différente, il est à souhaiter que les agents de la médiathèque puissent toujours faire prévaloir ce devoir de pluralisme dont la remise en cause pourrait apparaître à certains comme une chimère dans un état démocratique au XXIe siècle.

Pourtant, la mise au pas de la culture et de la liberté d’expression existe bel et bien. À Orange, lorsqu’il prend le pouvoir sous l’étiquette Front National avant de fonder son propre mouvement, la Ligue du Sud, Jacques Bompard a montré quel usage pouvait être fait d’une médiathèque publique faute de cadre législatif. Dès son arrivée aux commandes, il décrète un gel budgétaire et met en place dans les rayons de nouveaux ouvrages issus de dons transitant par le cabinet du maire. Les habitants purent alors consulter Alain de Benoist, Julius Evola, Jean Mabire, Carl Schmitt… Pire encore, les nouveaux élus se mirent à exercer un contrôle strict sur les achats effectués par les bibliothécaires jusqu’à faire des prescriptions d’achat. Les ouvrages sur le rap, le racisme ou évoquant le « mondialisme » (des contes régionaux d’autres pays), furent refusés. D’autres villes conquises par le FN dans les années 1990 ont été soumises à ce même régime. Malgré les dénégations de Marine Le Pen en 2014, dès l’année suivante, des polémiques naissaient à Fréjus sur la question de la pluralité de la presse de la médiathèque locale.

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