LA SPIRE, la factory biterroise

LA SPIRE, la factory biterroise

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L’association Surveyor 1 a transformé une ancienne agence bancaire de 240m2 en local artistique et associatif dédié à la photo et à la vidéo. Une superbe entreprise dont l’idée a germé dans la tête de trois jeunes gens qui se sont retroussé les manches et qui préfèrent taire leur nom « pour mettre en avant le projet ». Biterre s’est donc entretenu in situ avec A., N. et P.-F..  afin de percer les mystères de cette « Factory » biterroise.

Activisme Artistique

Des membres de cette association, nous ne savons que peu de choses. Vidéastes et photographes, « artisans et bricoleurs plus qu’artistes », ils se réunissent dans une colocation en 2016 et fondent Surveyor 1, du nom de la sonde de la NASA qui s’est posée sur la lune cinquante ans auparavant. Ils décident d’atterrir dans le quartier Saint-Jacques et s’allient avec les Nabuchodonosaurs qui occupent le lieu associatif baptisé Barnabu en haut de la rue Canterelle. Depuis, leur sonde métaphorique, Surveyor 1, va émettre sur les ondes radio et via internet en proposant des interviews et des débats sur le thème espace/espace urbain avec des intervenants et des animateurs. Le projet devait durer deux semaines. Victime de l’engouement qu’elle provoque, la radio ne s’arrêtera qu’en 2019.

En parallèle, et toujours au Barnabu, ils projettent La Soupe aux choux ou des documents sur le cosmonaute Gagarine, animent des ateliers cinéma, des activités liées à la photo et à la vidéo pour les enfants, ainsi que des sessions de thérapie basées sur l’enregistrement et l’écoute de sa voix pour les personnes souffrant de traumatismes crâniens.

Faire son cinéma

C’est à cette période que le collectif se lance dans la production de films. Après avoir vu leur premier court-métrage, des jeunes Biterrois présents sur des ateliers les approchent. Ils ont beaucoup aimé Les Naufragés de l’espèce et veulent réaliser leur propre film, en collaboration avec Surveyor 1. Ce sera R-Yo (pour Herriot, du nom du quartier face au Polygone), « écrit et joué par les gamins de la «cité rose». Deux ans de travail avec pour but de donner une meilleure image de leur lieu de vie ». Mission accomplie, et comment… Le court-métrage a aujourd’hui été visionné près d’un demi million de fois ! Une incroyable réussite pour un tournage amateur, avec très peu de moyens. Dans la foulée, et avec cette fois une équipe professionnelle, ils réalisent 2 Vez (pour Devèze). De ces expériences cinématographiques naissent des potentiels, des horizons. Depuis, ceux qui n’étaient au départ que trois jeunes néophytes ont mis un pied dans le monde du 7ème Art. Ils ont même obtenu un rôle dans le film Les Météorites de Romain Laguna. La magie ne s’arrête pas là puisque Zéa Duprez, à l’affiche du film, a été nommée aux César 2020 dans la catégorie « Actrice révélation » !

La Spire

Après ses nombreuses missions à Béziers et après avoir arpenté les villages et écoles de l’Hérault à bord d’une caravane-appareil photo, Surveyor 1 se décide à poser ses valises. Ils louent avenue Clemenceau les locaux d’une banque désaffectée et lancent de grands travaux en 2020. « Nous voulions avoir un lieu qui puisse regrouper nos espaces de travail personnel et, dans le même temps recevoir du public, des adhérents, sur des ateliers, des expos, des projections, toutes sortes d’événements ». Petit tour du propriétaire : porte de sécurité et bureaux vitrés dans leur jus, hall d’accueil transformé en hall d’exposition, salle des coffres sans fenêtre devenue chambre noire du laboratoire photo, grand garage dédié au montage vidéo analogique et numérique. Outre un petit coin sérigraphie, le reste de la surface est réservé à la réception du public pour des projections ou des ateliers.

« Nous voulons proposer aux adhérents plus que des événements et des expositions. L’idée est qu’ils s’investissent dans la pratique de la photo et de la vidéo, qu’ils découvrent en produisant, en maniant le matériel, en passant de la conception d’un boitier photo aux techniques de bases de la photographie, jusqu’au développement ».

En effet tout est là : agrandisseur, projecteur, film argentique, caméra,sans oublier les spires qui servent à plonger les pellicules dans les bains révélateurs.

« On pratique le bricolage artisanal avec des techniques expérimentales qu’on peut réaliser chez soi avec très peu de moyens comme le développement au caffénol, le sténopé, ou la remise en service d’appareils jetables utilisés. » L’association récupère d’ailleurs appareils, films, pellicules, papier, et autres pochettes de vinyles pour ses différents projets à venir.

Des projets qu’ils ont choisi de mener à Béziers et pas ailleurs. « Chacun de nous a vécu des expériences mitigées dans les grosses villes comme Marseille ou Londres. À Béziers, on est sur une autre planète. Il y a tout à faire, il y a du potentiel et des gens intéressés, des jeunes qui ont envie de se bouger. En créant, en se rencontrant, en organisant, tu as l’impression de faire quelque chose qui compte pour la ville. » 

Ce n’est pas qu’une impression. Voilà cinq ans que Surveyor 1 est un acteur culturel de Béziers et de ses quartiers populaires, cinq ans que le collectif tisse un lien humain fait d’art, d’aventures et de belles idées. On attend la suite avec impatience.