La sélection culturelle du mois de Février 2021

La sélection culturelle du mois de Février 2021

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Révolution, tome 1 : Liberté

Florent Grouazel et Younn Locard ; Actes Sud, 2019, 336 p., 26 euros 

Y-a-t-il encore quelque chose à dire d’original sur la Révolution Française ? Grouazel et Locard nous montrent que la réponse est « oui ». Des bas-fonds de Paris jusqu’à la cour, de la place de Grève jusqu’à la Bastille, c’est à une gigantesque fresque que nous invitent les auteurs. Le tour de force de cette bande dessinée est de réussir à décentrer le point de vue traditionnel sur l’été 1789 en montrant la Révolution en action par le bas. Les héros que nous suivons dans ce tourbillon parisien sont une petite orpheline, un noble breton qui s’engage dans la garde et un polémiste réactionnaire détestable qui prend les traits d’Eric Zemmour… La réussite réside également dans la prouesse graphique avec plusieurs doubles-pages qui donnent un souffle rarement rencontré dans la profusion graphique actuelle. La critique ne s’y est pas trompée avec un Fauve d’or obtenu au festival d’Angoulême.

Regards sur Napoléon III

Jean Sagnes, Christina égli ; éditions du Mont, 2020, 232 p., 35euros

Jean Sagnes, professeur d’histoire émérite de l’université de Perpignan, et Christina égli, conservatrice du château d’Arenenberg en Suisse, viennent de publier un ouvrage sur Napoléon III. Il ne s’agit pas là d’une énième biographie mais bel et bien de l’analyse du parcours politique de celui qui fut le dernier à occuper un trône en France. Le parcours du neveu de Napoléon est plus complexe que ce qu’en retient la mémoire collective. Pour le démontrer, les auteurs remettent en perspective l’éducation du Prince faite par un ami de Robespierre, mais se réfèrent aussi à ses écrits, notamment sa brochure sur l’extinction du paupérisme. Ils montrent ainsi que bien avant de devenir président de la République puis de réaliser son coup d’état, Louis-Napoléon puise aux sources du socialisme et s’inscrit dans le courant des saint-simoniens et que cette influence traverse son règne à venir. Des regards très novateurs et richement illustrés sur le dernier empereur. 

JOSEP

De Aurel

Pourtant né en Ardèche, c’est dans l’Hérault qu’Aurel vit et créé ses bandes dessinées à succès, souvent engagées politiquement. Après une première expérience « derrière la caméra » en 2011 où il co-réalise avec Florence Corre le court-métrage animé Octobre Rouge, il sort en 2019 le film d’animation Josep. Son premier long-métrage est à montrer dans les écoles tant il percute par son trait, son humour et les sujets qu’il aborde. Grâce à un flashback bien amené, la plume d’Aurel nous conte l’histoire méconnue d’un artiste au parcours exceptionnel. Au travers du peintre et de l’homme politique Josep Bartolí, le réalisateur dresse la chronique des réfugiés de la guerre d’Espagne parqués dans des camps de concentration du Sud de la France. Résilience, racisme, amour, héroïsme, poésie, responsabilité politique sont autant de thèmes dont traite Josep. Une réussite qui ne trompe pas : lauréat de plusieurs prix prestigieux dont celui du meilleur film d’animation européen, Josep a également été retenu pour faire partie de la sélection officielle du Festival de Cannes 2020.

1990

Demi-Portion

Avec 1990, le rappeur sétois ne se donne aucune limite et livre un disque tout en nuances et en sonorités éclectiques. Qu’il rappe dans son style inimitable de puncheur où il excelle (le classique instantané 1990, Sans commentaire, Ne lâche pas, La vie), qu’il chante ses refrains sur des instrumentales reggae dancehall (Phénoménal), où qu’il brouille les pistes entre hip-hop des origines et celui d’aujourd’hui (Trophée, Faire mieux, J’ai vu), il le fait avec le même talent. La même plume, parfois imagée et personnelle, souvent directe et critique, toujours honnête et précise. Le temps d’un featuring, il retrouve Mokless du groupe culte Scred Connexion pour une invitation à la fraternité teintée de nostalgie (Le choix).

En 9 titres défilent des mélodies inspirées d’Ennio Morricone, des samples de guitares d’Amérique du Sud façon Cypress Hill, des dialogues de films, des violons orientaux, des arrangements modernes… Un disque riche dans lequel Demi-Portion réussit à marier des couleurs très différentes sur une même toile. Un coup de maître. Un de plus.