Carole Delga, Présidente de la Région Occitanie
Photo : Léo Arcangeli - Région Occitanie

Carole Delga, Présidente de la Région Occitanie

L’agriculture en général et la viticulture en particulier, nous l’avons vu tout au long de ce numéro, traversent une période difficile. Comme si cela n’était pas suffisant, voilà que le Gouvernement vient de déclarer illégale la mention « Sud de France » sur les étiquettes de vin et d’huile d’olive, portant un rude coup à des années d’investissements et de communication autour de cette marque. Pourtant, « Sud de France » était devenue en quelques années un modèle d’identification difficilement contournable que les professionnels se sont appropriés et derrière lequel ils se sont unis, définissant par là même un territoire et une histoire communs.
Pour Biterre, Carole Delga, Présidente de la Région Occitanie, livre ses impressions sur ce sujet sensible, sur la situation de la filière viti-vinicole et donne des pistes pour l’avenir.

Le vin et la France sont liés, pas seulement économiquement, mais culturellement.

La marque Sud de France, initiée par Georges Frêche en 2006, ne pourra plus être apposée sur les bouteilles de vin et d’huile d’olive à partir de la récolte 2025. Votre réaction.
La décision du ministre de l’agriculture est d’autant plus incompréhensible quand on connait l’actuelle crise du vin en France. C’est bureaucratique, il n’y a pas d’autre mot. Aucune vision, aucune ambition. Le vin et la France sont liés, pas seulement économiquement, mais culturellement. Le vin, ce sont nos racines, nos paysages. Et moi, je veux que ce soit aussi l’avenir. C’est pour cela que nous avons plus que jamais besoin de Sud de France. Georges Frêche l’avait bien compris. Et dès la création de l’Occitanie en 2016, j’ai immédiatement décidé de l’étendre à tous nos départements. Pourquoi? Parce que nous sommes une région avec de multiples appellations et une grande diversité qui est une force : Sud de France a permis de fédérer, de rassembler, d’unir sur des valeurs claires, un imaginaire connu dans le monde entier. C’est une force pour l’export, voilà pourquoi j’entends continuer à développer la marque.

Cette règle très technocratique n’est-elle pas finalement le symbole d’une Europe hors-sol, éloignée de la réalité et des spécificités de chaque territoire ?
Je ne fais pas partie de ces responsables politiques qui critiquent l’Europe, bouc-émissaire facile depuis plus de 30 ans dans notre pays. C’est une décision bien française, pas euro- péenne ! L’Occitanie témoigne, comme bon nombre de régions du continent, de l’aide concrète apportée par l’Union européenne sur bien des sujets. Nous avons avec elle unecoopération efficace et réussie, dans un seul et même but : le développement plus juste et équilibré de nos territoires. Nos actions se complètent dans de nombreux domaines. Pre- nons l’exemple de la filière viticole. L’action de la Région Occitanie se concentre sur la structuration des entreprises : RH, transformation digitale, circuits de commercialisation… L’organisation commune du marché vitivinicole est un outil de développement de la filière, de l’amont à l’aval et de conquête des marchés. De l’adaptation du vignoble, à l’export sur les pays tiers, en passant par la modernisation constante des outils de transformation, elle concourt à l’agilité de nos entreprises. Elle doit rester sur ce rôle et ne pas devenir un outil de gestion structurelle des fluctuations de marchés.

Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, reste inflexible. Pensez-vous que le match est plié ou croyez-vous encore à une issue favorable ?
Le vrai match, c’est d’aider les viticulteurs de la région dans un moment difficile, c’est de soutenir leurs actions à l’export face à une toujours plus forte concurrence mondiale. Je n’ai pas le goût pour la palabre bureaucratique. Ce que je peux dire, c’est que même sans étiquetage, Sud de France va continuer à être fortement présente aux côtés de la profession. Nous allons travailler avec les interprofessions pour voir comment augmenter notre effort commun en faveur de la promotion de nos vins, c’est ça la vraie question, le vrai enjeu pour eux comme pour moi. Il faut de l’ambition pour notre viticulture.

La Région compte-t-elle mettre en place d’autres outils de communication et d’identification pour remplacer Sud de France ?
Notre marque Sud de France-l’Occitanie va continuer à se développer car elle a démontré toute son efficacité pour les entreprises, tant au niveau régional, qu’au national, qu’au niveau de l’export. Sud de France-l’Occitanie est aujourd’hui une marque de reconnaissance de nos produits pour les consommateurs et les distributeurs. C’est une fierté pour beaucoup d’agriculteurs et de viticulteurs qui se battent au quotidien et qui subissent de plein fouet l’inflation et l’augmentation des coûts de l’énergie. Concernant sa présence sur les étiquettes des bouteilles, j’ai pris acte de la décision du Gouvernement, même si elle va à contre sens de l’histoire, pour protéger nos entreprises. Nos services continuent de travailler étroitement à la création d’un nouvel identifiant puissant pour soutenir la commercialisation des vins régionaux sur les marchés national et international.

Un mot sur la situation viticole actuelle : quelles mesures la Région a-t-elle prises pour accompagner les viticulteurs dans la crise structurelle qu’ils traversent ?
Ces dernières années, nous avons travaillé avec l’ensemble de l’écosystème du secteur viticole pour aider les vignerons et les entreprises à traverser la crise sanitaire et ses effets à moyens termes, notamment avec les contrats de «Relance Viti » pour pousser les ventes sur le marché français et à l’export. Sur cette période, la Région a investi plus de 20 millions d’Euros pour la filière. Mais notre travail ne s’est pas arrêté là et nous avons anticipé le contexte difficile que nous connaissons aujourd’hui. Sous l’égide de la Chambre Régionale d’Agriculture, et avec les Vignerons Indépendants Français, la Coopération Vinicole, la Fédération du Négoce et les interprofessions, nous finalisons un véritable contrat de filière vitivinicole comprenant un large éventail d’actions que je souhaite opérationnelles pour 2024.

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